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d'Insectes n°104
Une politique de développement durable pour préserver la diversité biologique
Les Français ont depuis longtemps une réelle curiosité et un goût très vif pour la découverte des insectes. Les entomologistes amateurs et professionnels ont écrit ensemble l'histoire de l'entomologie française. Au pays de Réaumur, de Fabre, de Marchal et de tant d'autres, ce goût n'est pas près de s'éteindre, surtout s'il est renforcé par l'apparition de nouvelles motivations.
Les inventaires faunistiques et les descriptions
de nouvelles espèces et formes régionales, encore qu'ils soient
loin d'être achevés, ne suffisent plus à retenir l'attention
des entomologistes qui ont fait de prodigieux progrès dans d'autres
domaines scientifiques comme la physiologie, l'éthologie, la biologie
moléculaire ou le génie génétique par exemple.
Mais c'est surtout dans l'écologie que l'entomologiste va trouver
un champ d'action sans fin. Il devra prendre en compte la protection de la
nature par des recherches innovantes, tant fondamentales qu'appliquées
à la biologie de la conservation.
La prise de conscience de l'importance de la diversité biologique a été progressive. Elle a demandé beaucoup de temps pour être acceptée. Ce n'est qu'à partir des années 1970 que l'on voit apparaître les premiers textes internationaux relatifs à la protection de la nature : Convention de Ramsar (1971) ; Conventions de Berne et de Bonn (1979). En 1972 est organisée à Stockholm la première Conférence sur l'Environnement humain, puis celle de Vienne organisée par les pouvoirs locaux. En 1976, la France adopte la Loi sur la protection de la nature.
Les menaces sont toujours présentes, de plus en plus fortes. Les données actuelles estiment une disparition irréversible de l'ordre de 5 à 15% de l'ensemble des espèces mondiales d'ici l'an 2020. Parmi elles, 10 à 15% des insectes et autres invertébrés européens sont menacés d'extinction dans les décennies à venir. Situation dramatique au point que le comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté le 19 juin 1986 la Charte sur les Invertébrés.
Au cours de la Conférence de Rio-de-Janeiro en juin 1992, deux Conventions mondiales ont été signées, l'une sur les changements climatiques liés à "l'Effet de serre", l'autre sur la diversité biologique. L'équilibre des engagements entre pays du Nord et du Sud rend difficile les négociations de ces deux Conventions. Malgré ces obstacles, se dessine un cadre d'actions qui aura forcément des répercussions sur les politiques environnementales des Nations, les amenant à respecter l'équilibre environnement/développement par l'élaboration de stratégies, de plans et de programmes d'actions nationaux qui devront intégrer le concept durable de la diversité biologique. Dans cet esprit, le Conseil des Ministres de la Communauté européenne a adopté la directive 92/43 "concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages" dite directive Habitats ou encore "NATURA 2000". Cette directive s'intègre dans le programme d'action communautaire en matière d'environnement. Le Vème programme (1993-1998) renforce les dispositions concernant la conservation de la nature et des ressources naturelles. En France, des programmes d'actions par milieux et des programmes d'action pour la faune et la flore sont mis en oeuvre.
Le rapport de Mme Gro Harlem-Brundtland, déposé en 1987 à l'assemblée générale des Nations Unies, met à l'honneur le concept de développement durable. La convention mondiale sur la biodiversité prévoit une politique de conservation de la diversité biologique in situ, autant dans les espaces protégés créés ou à créer, que sur l'ensemble de l'espace rural, par la mise en place d'une règlementation et d'une gestion des ressources biologiques. Le monde rural se doit donc d'être étroitement associé à l'élaboration de statégies et de programmations prenant en compte l'ensemble de la richesse patrimoniale de notre pays et de l'espace européen. Les déclarations de la conférence européenne sur le développement rural (Cork - Irlande - nov. 1996) adoptent de façon explicite le concept du développement durable de l'espace rural et forestier. Les orientations liées à cette politique verraient un redéploiement des ressources non plus vers la production et les producteurs mais bien vers une meilleure gestion des territoires et une aide aux produits.
En France, la prochaine Loi d'orientation provoque des luttes d'influences politiques entre le Ministère de l'agriculture et les syndicats agricoles. On observe le manque d'influence du Ministère de l'environnement et des associations de protection de la nature. Les positions de l'Europe devraient alerter les responsables de notre agriculture, déjà mise à mal par une mauvaise maîtrise de la productivité, qu'une Loi d'orientation serait incomplète si elle n'intégrait pas la gestion durable des ressources.
Actuellement, la prise en compte de l'environnement et du développement durable conforte la politique générale que l'OPIE a développée depuis de nombreuses années dans le domaine de la protection des espèces et des habitats. L'aspect du développement durable dans l'espace rural pourrait être renforcé et devenir l'un des pivots de la politique de l'Office, notamment dans son projet d'éducation à l'environnement mais aussi au travers de ses activités d'inventaire et d'expertise.
"Les réseaux de l'OPIE constituent un outil très efficace, apte à réaliser des études de terrain à des échelles d'espaces et de temps pertinentes pour aider à la conservation d'espèces ou à la gestion de milieux".
Robert Guilbot, secrétaire général de l'OPIE