Vers la page d'accueil d'OPIE-Insectes
par Claire Villemant (1) et Alain Fraval (2)
(1) Laboratoire d'Entomologie, Muséum national
d'histoire naturelle
villeman@mnhn.fr
(2) Département de Zoologie et M&S,
INRA
afraval@wanadoo.fr
Le Grand Capricorne
La Fourmi du liège
Le Bombyx disparate
La Tordeuse verte
Le Carpocapse des glands
Orientation blbliographique
Xylophages primaires et secondaires (encadré)
Le Calosome sycophante (encadré)
Le Grand Capricorne est remarquable par sa taille, 30 à 55 mm de long,
Il est de couleur marron uniforme, avec les élytres finement rugueux.
La larve, apode, de couleur ivoire, mesure jusqu'à 70 mm de long.
Les oeufs, de même couleur, sont à peu près
sphériques.
Les imagos, qui apparaissent au début de l'été, passent
la journée immobiles dans leur galerie et entrent en activité
dès le coucher du soleil. Ils circulent toute la nuit sur le liège
où ils sucent les minuscules écoulements de sève épars
sur les troncs. Leur stridulation est produite par un appareil situé
à l'articulation du pro- et du mésothorax. On la provoque ni
saisissant l'animal (qui peut mordre énergiquement). Les mâles
se livrent entre eux à de violents combats, qui pourraient servir
à établir une sorte de territoire. La femelle fécondée
grimpe souvent en haut de l'arbre, puis elle dépose ses oeufs
isolément dans de petites fissures du liège.
La jeune larve vit dans l'écorce ; elle creuse ensuite, dans le liber
puis dans le bois de coeur, une galerie (de section ovale) qui peut atteindre,
en fin de développement, plusieurs cm de large. La sciure est tassée
dans la galerie (vermoulure ou " frass "). Une quantité notable est
excavée par le trou de pénétration de la jeune larve.
Le développement larvaire est très long : de 2 à 3 ans.
La logette nymphale, ovoïde, recouverte intérieurement d'une
substance crayeuse est caractéristique.
En Europe méridionale et en Afrique du Nord, le Grand Capricome est
parfois très nuisible au Chêne-liège. Signalons que ses
larves sont activemement recherchées (au prix de la cassure des branches)
par les riverains des subéraies au sud de Rabat qui les consomment
en brochettes. L'espèce, devenue rare en Europe, y est
protégée.
Les ouvrières, brun-noir à tête rouge, sont relativement
petites (1 à 5 mm). On les reconnaît à leur façon
caractéristique de relever leur abdomen cordiforrne au dessus de la
tête. Elles mordent férocement leurs agresseurs mais ne piquent
pas. Les sexués sont plus discrets, les femelles (10 mm) ont la tête
rouge et l'abdomen noir, les mâles (6 mm) sont entièrement brun
noir.
Les Chênes-lièges attaqués se reconnaissent aux nombreux
orifices d'entrée de la fourmilière (10 à 30 trous de
2 mm de diamètre environ) par lesquels entrent et sortent sans arrêt
des colonnes d'ouvrières. On voit aussi de temps en temps déboucher
d'autres ouvrières qui laissent choir au sol des fragments de liège.
Le nid creusé depuis la surface dans l'épaisseur du liège,
sur 3 à 4 cm de profondeur et 1,5 à 2,5 m de hauteur, est
généralement constitué de plusieurs parties reliées
les unes aux autres par un réseau de galeries. Chaque portion du nid
est formée d'un grand nombre de chambres sans architecture bien
définie situées à différents niveaux de
l'épaisseur de l'écorce et reliées par de courts passages
étroits. Les plus grandes chambres sont souvent recloisonnées
par une sorte de carton de bois. Couvain et ouvrières occupent des
chambres sur toute l'étendue du nid. Les larves de tous âges
sont mélangées. Dans les nids très populeux, les oeufs
sont regroupés dans la chambre où se trouve la reine qui est
entourée d'ouvrières souvent beaucoup plus petites que dans
le reste du nid.
Les colonnes de récolte s'étendant à de très
grandes distances du nid, tant sur l'arbre qu'au sol. Sur leur parcours,
la surface du liège est légèrement creusée et
de couleur plus claire que le reste de l'écorce. Les ouvrières
recherchent et exploitent les colonies de Pucerons arboricoles de la frondaison
des Chênes ; elles protègent aussi certaines Cochenilles du
Chêne-liège que l'on trouve à l'intérieur des
fourmilières fixées sur la mince pellicule qui sépare
le nid du bois. Outre le miellat des Homoptères, la nourriture de
la Fourmi du liège se compose essentiellement d'Insectes vivants ou
morts.
Cette Fourmi est nuisible à l'économie du liège. D'une
part, très agressive, elle mord les ouvriers qui récoltent
le liège. D'autre part, les planches de liège " fourmillées
" (creusées de ses galeries) perdent beaucoup de leur valeur.
Ce Lépidoptère est celui qui provoque les dégâts
les plus spectaculaires parmi tous ceux qui vivent aux dépens du feuillage
du Chêne-liège. Au va-et-vient incessant d'une foule de chenilles
(jusqu'à 30 000 par arbre) tombant des extrémités des
rameaux et regrimpant sans cesse, à la pluie très audible de
leurs crottes, succède une forêt sans vie avec des arbres absolument
dénudés. au pied cerclé d'un tas de cadavres de chenilles.
Cette désolation dure peu ; 3 semaines plus tard, les arbres
débourrent de nouveau en un faux printemps.
En dehors de ces périodes de défoliation totale, P. dispar
signale sa présence par ses pontes bien visibles, plaques ovales
chamois clair, de quelques cm de grand diamètre, accolées au
liège (d'où son autre nom de " Spongieuse "). Les chenilles
très velues sont caractérisées par des taches de couleur
(une étoile crème, des verrues bleues et d'autres rouges).
La chrysalide est brun roux satiné, à peu près glabre.
Elle est accrochée aux aspérités du liège dans
un filet de soie très lâche. La femelle est beaucoup plus grosse
que le mâle. Le dimorphisme sexuel est considérable chez les
imagos (d'où le nom de l'espèce). Le papillon mâle, aux
antennes bipectinées, est brun, svelte, bon voilier. La femelle, blanche,
avec un gros abdomen, ne vole pas.
L'espèce a une génération par an. La femelle dépose,
en juin, une unique ponte. constituée par l'empilement sur 3 ou 4
couches de plusieurs centaines d'oeufs sphériques (diam. l mm),
enrobés par des poils issus de son extrémité abdominale.
L'éclosion n'aura lieu qu'au printemps suivant.
Le Bombyx disparate, en pullulation, supprime la g1andée et réduit
la croissance de l'arbre ; il est surtout gênant pour les promeneurs
et les riverains, dont les habitations sont envahies par des hordes de chenilles
poilues. non urticantes mais d'aspect peu avenant.
Pour en savoir plus sur le Bombyx disparate :
les pages Lymantria dispar
du Courrier de l'environnement.
Elle doit son nom à la couleur vert tendre de ses ailes antérieures,
le corps et les ailes postérieures étant gris-argenté.
La chenille est verte, ponctuée de noir ; sa tête est noire.
L'insecte présente une génération par an. Les oeufs
sont déposés en été par groupes de 2 sur
l'écorce des jeunes rameaux et les cicatrices foliaires. L'éclosion
a lieu au printemps suivant et les jeunes chenilles pénètrent
alors à l'intérieur des bourgeons floraux dont elles se nourrissent
; elles s'attaquent ensuite aux jeunes feuilles. La fin du développement
larvaire, puis la nymphose, s'effectuent dans un cornet fait de 2 à
3 feuilles enroulées et maintenues par des fils de soie. La chrysalide
est brun-noir, brillante.
Les papillons de Cydia fagiglandana (= Laspeyresia grossana Haworth), d'environ 15 mm d'envergure, sont bruns. Leurs ailes antérieures, brun-noir, sont traversées de paires de fines zébrures grises. Un " miroir ", tache ovalaire d'un brun plus foncé est visible à leur angle postéro-interne. Les ailes postérieures sont uniformément brun clair. La chenille est de couleur rose.
La chenille pénètre dans le gland lorsqu'il est sur l'arbre
et achève son développement en décembre ou janvier,
puis elle quitte le gland tombé à terre pour se nymphoser dans
la litière. Elle tisse un cocon de soie, dur, aggloméré
de débris, dans lequel elle se tient immobile jusqu'à sa nymphose
en mars-avril. Les premiers adultes émergent à la fin du
printemps.
Les glands attaqués ont la chair creusée de galeries superficielles
(2 à 3 mm de diamètre), remplies de soie mêlée
de granules excrémentiels ; ils sont souvent déformés
ou fendus.
On pourra consulter ces documents présentant la faune du
Chêne-liège dans différents pays :
Maroc :
Villemant C., Fraval A (ed.),1991. La faune du
Chêne-liège. Colt. Doc. sci. techn., Actes Editions, Rabat,
(sous presse)
Fraval A. 1989, 1989. Lymantria dispar. Coll. Doc. sci. techn., Actes
Editions, Rabat, 220 pp.+ ill.
Italie :
Martelli M.., Aarru J.M., 1956. Ricerche preliminari sull'eniomofauna
colla quercia da sughero (" Quercus suber " L.) in Sardegna. Boll.
Zool. Agr. Bachic. S., 22, 5-49.
Luciano P., Delrio G., Protar., 1982. 1 defoliaiori dette foresie a Quercus
suber L. Siudi Sass. sez., 3, Ann. Fac. Agr. Univ. Sassari, 29,
321-365.
Casevitz-Weulersse J., 1981. Aspects ce la faune du Chène-liège
(Quercus suber L.) lors d'une pullulation de Lymantria dispar
L.(lep. Lymanlriidae) et de Malacosoma neustria L. (Lep.
Lasiocampidae) en Sardaigne. Bull. Ecol., 12(4),
355-364.
Espagne :
Montoya Olivier J.M., 1980. Los Acornocales (Quercus suber
L. ). lnsi. nac Investigafiones Agr., Publ. Extension Agr., Madrid, 155 pp.
M-A. P-A., 1981 Plagas de insectos en las masas forestales Espanolas.
Ministerio de Agicufiura, Pesca y Alimentacion (Madrid), 252 pp.
Portugal :
Baeta-Neves C.M., 1948. Contribuçao para o conhecimenio da
entomofauna do sobreiro.Bol. Junta N. Cortiça, 10(117),
444-447.
France :
Bigot L., Kabakiri M., 1987. Evolution spatio-temporelle de la composition
et de la structure du peuplement frondicole sur Chêne- liège
dans le massif des Maures (Var). Bull. Ecol., 18(3), 157-168.
Les principaux consommateurs du
chêne-liège
a: consommation des feuilles et des bourgeons; b: consommateurs de liège
et de bois)
C. Villemant del.
Les numéros renvoient au tableau général des espèces
du chêne-liège, ci-desous.
[R]
Insecte (nom scientifique) |
n° |
Famille |
Nom en français |
* |
** |
Bois du tronc et des branches |
x1: xylophage primaire x2 : xylophage secondaire s : saproxylophage |
||||
Cerambyx cerdo L. Prinobius scutellaris (Germar) Brachyleptura cordigera (Fuesslins) Xylotrechus antilope (Schönherr) Platypus cylindrus L. Coroebus florentinus (Herbst) (= fasciatus Villers) Coroebus undatus F. Agrilus hastulifer (Ratz) Xyleborus monographus F. Xyleborus saxeseni (Ratz) Lucanus tetraodon Thunberg Allecula semilivida Pic Rhyncolus ater (L.) Cossus cossus (L) Calotermes flavicollis (F.) |
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 |
Col. Cerambycidae Col. Cerambycidae Col. Cerambycidae Col. Cerambycidae Col. Platypodidae Col. Buprestidae Col. Buprestidae Col. Buprestidae Col. Scolytidae Col. Scolytidae Col. Lucanidae Col. Alleculidae Col. Curculionidae lép. Cossidae Isopt. Calotermitidae |
Grand Capricorne Platype Ver des branches Couleuvre Cerf-volant Gâte-bois Termite à cou jaune |
l l l l l l l l l l l l l l l/a |
x1 x2 x2 x2 x1 x1 x1 x1 x1/x2 x2 s s s x1 s |
Liège | |||||
Crematogaster scutellaris (Ol) | 13 | Hym. Formicidae | Fourmi du liège | a | |
Feuilles et bourgeons
|
d: découpeur ps: piqueurs-suceur m: mineur g: gallicole |
||||
Lymantria dispar (L.) Orgyia trigotephras Boisd. Euproctis chrysorrhoea L. Thaumetopoea processionea L. Totrix viridana (L.) Malacosoma neustria L. Catocala nymphagoga Esper Eupithecia massiliata Milière Phyllonoricter messaniella (Zeller) Teleiodes decorella Haworth Labidostomis taxicornis F. Attelabus nitens (Scopoli) Coeliodes ilicis (Bedel) Rhynchaenus irroratus Kiesenwetter Neuroterus lanuginosus Giraud Arnoldia cerris (Kollari) Thelaxes dryophylla Schrank |
14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 |
Lép. Lymantriidae Lép. Lymantriidae Lép. Lymantriidae Lép. Thaumetopoeidae Lép. Tortricidae Lép. Lasiocampidae Lép. noctuidae Lép. Geometridae Lép. Gracillariidae Lép. Gracillariidae Col. Chrysomelidae Col. Curculionidae Col. Curculionidae Col. Curculionidae Hym. Cynipidae Dipt. Cecidomyidae Hom. Aphididae |
Bombyx disparate Orgyie Cul-brun Processionnaire du chêne Tordeuse verte Bombyx livrée Catocale Cigarier Puceron vert du chêne |
l l l l l l l l l l a 1/a l/a l/a l l l/a |
d d d d d d d d m m d d d m/d g g ps |
Rameaux | |||||
Lachnus roboris L. Kermococcus vermilio (Planchon) Asterolecanium variolosum (Ratz) |
Hom. Aphididae Hom. Coccidae Hom. Coccidae |
Puceron noir Cochenille à carmin |
l/a l/a l/a |
ps ps ps |
|
Fleurs |
po:
pollinivore b: brouteur g: gallicole |
||||
Apis mellifica (L.) Andricus grossulariae Gir. Biorhiza pallida (Olivier) Apion spp. Haplocnemus aestivus Kiesenwetter Melanophthalma distinguenda Comoli Mordellistena micans Germar |
Hym. Apidae Hym. Cynipidae Hym. Cynipidae Col. Curculionidae Col. Dasytidae Col. Lathridiiae Col. Mordellidae |
Abeille domestique |
a l l a a a a |
po g g b po po po |
|
Glands |
c: glandivore g: gallicole |
||||
Cydia fagiglandana (Zeller) Cydia splendana (Hübner) Curculio glandium Marsham Neuroterus glandiformis (Giraud) |
Lép. Tortricidae Lép. Tortricidae Col. Curculionidae Hym. Cynipidae |
Carpocapse des glands Carpocapse des chataîgnes Balanin des glands Cynips des glands |
l l l l |
c c c g |
Les numéros renvoient aux dessins (a et b, ci-dessus) des
principaux consommateurs de Quercus suber
*: stade consommateur; **: type de relation trophique avec Q.
suber
Cette liste est loin d'être exhaustive; seuls les groupes importants
y figurent, souvent au travers d'un seul exemple
[R] Xylophages primaires et secondaires (encadré)
Les forestiers distinguent, parmi les Insectes xylophages, les ravageurs primaires -capables de s'installer sur un arbre vivant et en pleine vigueur des ravageurs secondaires - qui ne peuvent se développer que sur des arbres malades ou endommagés. Les Insectes saproxylophages sont des spécialistes du bois mort, plus ou moins modifié par l'action de xylophages et/ou par des moisissures.
[R] Le Calosome sycophante (encadré)
Calosoma sycophanta L., est un pros Carabe aux belles couleurs
métalliques. on corselet est bleu, ses élytres, striés,
sont verts à reflets cuivrés.
Larves et adultes escaladent les troncs, à la recherche des chenilles
et des chrysalides des principaux défoliateurs du Chêne-liège,
Cul-brun, Processionnaire du Chêne et Bombyx livrée, mais ils
manifestent souvent une préférence pour le Bombyx disparate.
Chaque adulte peut en consommer une centaine de chenilles dans la saison.
Fiche reprise d'Insectes, n°88, 1er trimestre 1993. Avec des illustrations supplémentaires (dessins de Claire VIllemant).