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Avant toutes choses, recommandons au collectionneur, qui va entrer en chasse, de na pas s’embarrasser de tout un fourniment inutile et encombrant.
Le chasseur de papillons doit avoir bon pied, bon œil ; légèrement équipé, libre de ses mouvements, le meilleur bagage est pour lui le plus léger ; ses armes sont peu nombreuses, peu lourdes et peu dispendieuses.
D’abord le filet à papillons, puis la pelote garnie de ses longues épingles, ensuite une boîte légère portée en bandoulière, et voilà l’attirail complet. Joignez à cela un flacon pour la récolte des petits papillons, un fort couteau ou écorçoir (fig. 1) pour soulever incidemment les écorces et y découvrir des chrysalides, et jamais Nemrod ne partit mieux armé contre les hôtes des bois.
Outillage de la chasse aux papillons.
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1. Écorçoir. - 2. Filet à papillons. - 3. Cercle du filet à
papillons. - 4. Cercle plian tà brisures. - 5. Mode d'attache avec vis
et écrou.
Le filet à papillons (fig. 2) est un engin qui doit réunir deux qualités indispensables : légèreté et solidité ; tout vice contraire est rédhibitoire. Il se compose, en sa grande simplicité, d’une poche en tulle ou gaze tenue ouverte par un cercle de fort fil de fer ou d’acier, fixée à l’extrémité d’une longue canne (fig. 2). Les meilleures dimensions, encore qu’elles n’aient en soi rien de rigoureux, nous paraissent un pied de diamètre pour le cercle (fig. 3), un mètre soixante de longueur de canne ; cette dernière gagne à être formée d’un bambou creux.
Le cercle peut posséder une ou plusieurs brisures, ce qui permet de le plier et de le mettre en poche dans l’intérieur de la ville (fig. 4).
Ce cercle se visse à la douille de cuivre surmontant la canne au moyen d’un écrou (fig. 3). La poche se fait d’ordinaire en gaze, d’aucuns la fabriquent en tulle ; pour nous, nous préconisons le crêpe comme plus solide et s’altérant moins à la pluie. Une profondeur de soixante centimètres est d’une bonne moyenne. Un conseil : ne pas terminer la poche en pointe ; mais bien en un seul cul de sac rond, le papillon frottera moins ses ailes délicates contre l’étoffe. Un papillon frotté est vite gâté. La poche se monte sur un large ruban de fil solide plié en double dans lequel passe le fil de fer du cercle.
Décrire la pelote nous paraît superflu ; il y en a de toutes sortes ; le mieux est de s’en construire une avec deux disques de carton, entre lesquels se trouve inclus du son, reliés entre eux par un ruban dans lequel on enfonce les épingles (fig. 6). Le chasseur trouvera avantage à porter cette pelote pendue à sa boutonnière, de manière à avoir toujours sous la main l’épingle nécessaire pour piquer sa capture.
Outillage pour la chasse aux papillons.
- 6. Pelote à épingles. - 7. Épingles. - 8. Flacon pour les petits papillons. - 9. Instrument pour piquer les papillons de nuit.
Les épingles sont d’une taille, d’une longueur, d’une fabrication spéciales et en laiton étamé (fig. 7). Les n°3, 4, 5, 6, et 7 du commerce sont les plus usités, et la longueur référable nous paraît être 36 millimètres. Certaines épingles sont passées au vernis noir, ce qui leur donne l’avantage de ne pas s’oxyder, qualité précieuse pour les papillons à chenilles xylophages. Les épingles ordinaires traversant ces papillons ne tardent pas à se couvrir au niveau du corps de l’insecte, de houppes de vert-de-gris faisant surtout en dessus, sur le corselet des Cossus ou des Sésies, l’effet le plus déplorable, et d’autant plus désastreux que l’épingle fini par se briser.
La boîte de chasse doit avoir 0m,35 environ de long su 18 cm de large, et 8 centimètres de profondeur (fig. 13). Divisé en trois compartiments inégaux, elle permet de rapporter avec les cadavres des papillons empalés, les chenilles vivantes avec un peu de nourriture soigneusement calées avec de la mousse. Le plus grand compartiment aura son fond garni d’une épaisse feuille de liège, ou mieux de moelle d’agave, matière que l’on trouve maintenant chez tous les marchands naturalistes. Cette substance est plus molle que le liège, et les épingles fines s’y enfoncent aisément, sans que la main soit obligée de faire effort. C’est dans ce compartiment qu’on piquera les papillons au fur et à mesure de leur capture. Les deux autres compartiments pourront se subdiviser en quelques petites loges, afin de pouvoir interner séparément certaines chenilles, pensionnaires dangereuses par leurs habitudes carnassières. L’habitude apprendra vite à reconnaître ces carnivores, dont nous parlerons lors de l’éducation des chenilles.
Le flacon destiné à récolter tous ces petits papillons (microlépidoptères) aux couleurs brillantes et aux mouvements rapides, mérite de nous arrêter quelques instants ; c’est un engin commode et important qui demande à être construit avec soin.
On se procurera un flacon de verre blanc, à large goulot, de dimensions moyennes, pouvant tenir aisément dans la poche (fig. 8). On dispose au fond un morceau de cyanure de potassium gros comme une noix. Ce sel demande à être manié avec précaution, car c’est un violent poison, et son contact avec une écorchure aux doigts suffit pour amener de graves accidents ; aussi doit-on le manier avec des pinces. Préalablement enveloppé d’amadou et roulé dans de la ouate, ce morceau de cyanure est déposé au fond du flacon. On découpe ensuite un disque de papier de la dimension intérieure du bocal, on en relève les bords dentelés à coups de ciseaux et enduits de gomme, puis on l’introduit dans le bocal et avec une pince, on dispose ce diaphragme et on le colle aux parois. Lorsque la colle est sèche, on peut fermer le goulot avec un bouchon de liège ; on a ainsi isolé le cyanure au fond du flacon, le plancher de papier percé de nombreux trous d’épingles laissera passer les vapeurs d’acide prussique qui foudroient sans les endommager les papillons prisonniers.
Il est un dispositif plus simple qui consiste à dissoudre le cyanure de potassium dans de l’eau avec laquelle on gâche du plâtre. On laisse ce plâtre durcir en séchant au fond d’un bocal, et cet engin présente tous les avantages du précédent, sans avoir besoin d’être renouvelé souvent comme le demande le diaphragme de papier.
Ces quelques préliminaires établis, entrons en chasse.
Lorsque l’on voit un papillon posé, la première condition est de s’en approcher doucement, le filet prêt et néanmoins tenu de manière à ce que l’insecte ne puisse pas apercevoir son ombre. Si le papillon est posé sur une plante, le long d’un troc d’arbre, d’une barrière, etc., il faut le prendre d’un rapide coup de filet en remontant, et on se hâte de retourner brusquement le filet, pour que la poche se ferme, par un mouvement sec du poignet, analogue à celui qui est nécessaire en escrime pour prendre un contre de sixte. Si l’insecte est posé à terre, on le couvre avec un filet, puis on lève le fond de la poche de manière à ce qu’il monte dedans. De toutes manières, quand le papillon est capturé, il faut le cerner dans le fond du filet vivement et néanmoins avec précaution. Puis on le saisit par les côtés du corselet, et on le presse délicatement entre le pouce et l’index d’une façon modérée (fig. 10). On laisse ensuite tomber la victime immobilisée dans la main gauche, et on la pique sur le dos avec une épingle proportionnée à sa taille, et dont la pointe ressorte en dessous entre les deux dernières pattes, perpendiculaire à l’axe longitudinal du corps (fig. 11). Le but que l’on se propose, en comprimant les côtés du corps du papillon, est de l’immobiliser en froissant les muscles moteurs des ailes, de telle sorte qu’il ne puisse, en se débattant, ni les déchirer, ni les défraichir.
Le
papillon est ainsi piqué sur le fond liégé de la boîte que le chasseur
habile ne tarde pas à remplir de ses captures ; il arrive souvent, que
manquant de place, il se voit obligé de piquer plusieurs papillons à la
même épingle (fig. 12). Il faut avoir soin, dans ce dernier cas, de
bien immobiliser les papillons par une pression exercée à propos, et de
les embrocher par les côtés du corselet. Les papillons de nuit se
rencontrent fréquemment posés le long des surfaces verticales, murs,
troncs d’arbres, sur lesquelles ont aurait quelque peine à les prendre
avec le filet. Le meilleur moyen de s’en emparer consiste à les piquer
sur place avec un petit instrument composé de trois aiguilles
emmanchées après un petit manche du volume d’un crayon (fig. 9) ; une
seule aiguille pourrait glisser sur le corselet rond et écailleux de
beaucoup d’espèces, les trois aiguilles manquent rarement leur coup. Il
est encore plus commode de recouvrir rapidement le bombycien ou la
noctuelle avec le flacon à cyanure au fond duquel la bestiole ne tarde
pas à se laisser tomber étourdie ; lorsqu’elle est asphyxiée, ce qui
demande peu de temps, elle est retirée et piquée dans la boîte.
Outillage pour la chasse aux papillons
- 15. Boîte de chasse. - 16. Boîte pour les petits papillons.
Ces brillants petits papillons, Teignes, Tordeuses, connus sous le nom de Microlépidoptères, doivent être pris encore avec les plus grands soins, car un rien suffit pour détériorer ces admirables et fragiles petits êtres : à peine sont-ils morts dans le flacon qu’on doit les mettre dans une petite boîte à pillules (fig. 14), garnie de fine ouate, dans laquelle ils attendront leur préparation .
Maurice Maindron; La Nature, 1er semestre 1888, p. 203-206
__________À voir sur ce site : Les outils de l'entomologiste et, au fil des livraisons d'Insectes, la série Capture et collections.
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